Lettre d'info n°9 : Le Development Center

Edito

Les analyses sociologiques récentes font apparaître une évolution de la relation entre les salariés et l'Entreprise.

Face à l'exacerbation de la concurrence, l'Entreprise, pour survivre et se développer, doit réagir et agir plus juste et plus vite. Flexibilité, ouverture à la relation client, créativité, compétence technique constituent alors les atouts fondateurs de son avantage concurrentiel.

En parallèle, le vécu du salarié est souvent tout autre : pressurisation, insuffisance ou absence de reconnaissance en tant que personne, quantité plus que qualité, vision brouillée de l'avenir.

Autant de perceptions qui conduisent aux constats que nous rencontrons :

  • une exigence croissante de compétences techniques et relationnelles dépassant la simple employabilité,
  • une forte mobilisation souhaitée mais une motivation fluctuante,
  • une volatilité accrue des expertises,
  • un projet d'entreprise dont la visibilité moindre entraîne une adhésion plus circonspecte, une image perçue et véhiculée moins positive.

Comment interrompre cette spirale ou éviter de s'engager sur cette pente glissante et coûteuse à terme ?

En privilégiant :

  • une vision 'développement' des ressources humaines plutôt que tournée vers l'intérêt immédiat,
  • une co-responsabilité entre l'entreprise et ses salariés dans l'enrichissement des compétences.

En construisant, à moyen terme, la politique et la gestion des ressources humaines, même si le cycle des produits ou des services de l'entreprise est, lui, à court terme.

Dans ce cadre, la mise sur pied d'un Development Center constitue une étape constructive et intégrative de la relation partenariale entre une organisation et son collaborateur.

Pour le manager, il s'agit d'une opportunité de positionnement au sein de la culture de son entreprise comme de croissance personnelle en s'appropriant les facteurs de compétences propres à son contexte.

Pour l'entreprise, la mise en oeuvre est exigeante, tant sur le plan de la réflexion sur sa propre culture, son management, que de l'obligation de mettre en place des actions de développement des compétences, sous peine de réaction en retour.

La démarche est fondée sur le 'réalisme' des mises en situation, leur mise en perspective avec un référentiel comportemental propre à l'entreprise. Les prises de conscience qui en résultent, permettent d'introduire du sens et de la cohérence dans les objectifs et les actions, de 'construire avec' dans une logique de croissance partagée et responsable.

Donner du temps, communiquer, privilégier la clarté sont certainement les trois ingrédients indispensables à la réussite d'un Development Center.

Notre Cabinet, positionné sur le 'développement durable' en matière de ressources humaines a naturellement choisi d'accompagner les entreprises pour la création d'un Development Center, et leurs salariés dans leur croissance personnelle.

Jehanne MAROT et Fabienne PEZEU

 

De l'évaluation au développement : Sylvie Grèze, Consultante Ressources Humaines au Crédit Lyonnais

FMK : Qu'est-ce qui a amené le Crédit Lyonnais à mettre en place ce type de dispositif ?

Traditionnellement dans la banque, la majorité des fonctions supports est occupée par d'anciens commerciaux. Or, une personne peut être un excellent commercial mais pas forcément un bon formateur. C'est pourquoi nous avons mis en place un Assessment Center en prenant appui sur l'expertise de deux personnes de la division formation. Nous l'utilisons comme un outil :

  • d'aide à la décision en vue de changements de filière, afin de mieux identifier les profils des personnes, notamment pour des commerciaux s'orientant vers les métiers RH.
  • de cartographie d'équipes
  • de sélection des candidats au Certificat Supérieur de Banque...

Il est associé, pour les personnes évaluées positivement, à une seconde phase de développement des compétences pour une meilleure adéquation homme/poste. Dans tous les cas, ce processus est un outil de développement personnel et professionnel pour le collaborateur.

FMK : Comment construisez-vous le référentiel des comportements à observer ?

Nous l'élaborons avec le commanditaire, ligne métier ou direction, en fonction des caractéristiques du poste et du profil nécessaire. Les dimensions retenues varient donc selon les fonctions sur lesquelles nous travaillons.

FMK : Quels exercices utilisez-vous dans les sessions ?

Nous en changeons souvent. Nous utilisons fréquemment des exercices 'in-basket' (exercices de tri de courrier), des sessions de groupe où les candidats doivent produire un travail en commun sous l'oeil d'observateurs (assesseurs), et également des mises en situation après analyse d'une séquence vidéo. Le choix d'exercices est large et adapté aux besoins du poste ou du métier. Parfois nous avons également recours à des exposés en public et/ou des cas pratiques de simulation d'entretiens, de recherche d'informations.

FMK : Comment permettez-vous aux participants de prendre conscience de leurs points forts et de leurs axes de progrès ?

Cette clarification se fait à quatre moments :

  1. Pendant la session, les candidats font un débriefing entre eux. Nous leur demandons de réfléchir sur ce qui s'est passé et d'échanger du feed-back.
  2. Après chaque exercice, un débriefing individuel est effectué entre le participant et un assesseur.
  3. En fin de session, chaque personne béneficie d'un entretien individuel avec l'un des assesseurs. Il peut prendre du recul, livrer son ressenti et réfléchir à ses comportements.
  4. Dix jours après, au cours de l'entretien de débriefing global, l'assesseur communique au candidat les points à développer et les moyens à mettre en oeuvre pour correspondre au mieux au profil recherché. Cet entretien est dissocié de la décision de gestion proprement dite. Il est orienté sur le développement de la personne dans le poste envisagé. Les participants reçoivent un document écrit personnel et confidentiel comprenant leurs points forts et leurs points à développer.

FMK : Que faîtes-vous à l'issue de ces sessions?

Les résultats de l'Assessment Center sont utilisés pour la construction de parcours d'accompagnement et des 'changements de trajectoire'. Selon les postes, les points forts des personnes et des compétences qu'elles ont à développer, nous proposons des actions ciblées. Par exemple, à l'issue d'un 'in basket', nous remarquons que la personne ne mémorise pas les informations écrites. Nous lui préconisons donc un accompagnement spécifique pour remédier à cette difficulté. Dans tous les cas, il y a des actions de formation ou parfois même un coaching sur le poste de travail.

FMK : Comment les participants perçoivent-ils cette démarche ?

Pour la majorité d'entre eux, c'est la première fois qu'ils reçoivent un feedback sur leur façon d'agir. Les personnes sont valorisées parce qu'elles se sentent reconnues en tant qu'individu. Il y a un vrai discours d'égal à égal, où règnent honnêteté et transparence. On entend des phrases comme ' merci, je suis plus conscient de ce que je suis, cela m'a rendu plus sûr de moi...'. Contrairement aux craintes manifestées dans l'entreprise, la plupart des personnes disent très clairement ce qu'elles pensent d'elles-mêmes et parlent de leurs failles. Elles apprécient d'entendre une évaluation franche et fondée de leurs comportements par rapport à un profil. On leur ouvre ainsi un champ de possibles.

FMK : Pourquoi avez-vous choisi l'approche comportementale ?

Nous voulions élargir l'optique de l'évaluation annuelle des compétences et des performances, mais surtout sortir de la logique selon laquelle les personnes seraient bonnes ou mauvaises. Il n'y a pas de bon ou de mauvais comportement en soi mais des façons de se comporter dans telle ou telle situation qui sont plus ou moins adaptées. Nous pensons que chacun se développe tout au long de sa vie. Il est dangereux, comme on l'entend parfois, de tirer un trait sur quelqu'un ou de le porter aux nues. Ce type de dispositif R.H. est un outil souple au service de la gestion, avec des allers et retours d'information et un suivi entre l'entreprise et les personnes. C'est l'approche comportementale dans son caractère ' photographie comparative ' à un moment donné, qui peut permettre cela.

 

Un Development Center : pour qui ? pour quoi ?

Un contexte de management humaniste

Le Development Center s'inscrit délibérément dans une culture managériale plaçant la ressource humaine au centre de l'organisation, ou tout au moins 'en majeur' par rapport à la structure et aux process. Il trouve naturellement sa place lorsque les coûts de recrutement et d'intégration sont supérieurs à ceux du maintien et du développement des compétences. Constituant une étape d'un cycle de gestion des ressources humaines à moyen terme, fondé sur une logique de relation et de profit gagnant-gagnant, il vient, le plus souvent, compléter une politique d'identification des hauts potentiels.

Une contribution immédiate et durable

A la différence d'une gestion des compétences 'utilitariste' et court-termiste, le Development Center enrichit l'entreprise à deux niveaux, très directement et rapidement dans la gestion des ressources :

  • par la préparation de la mobilité interne, 
  • par l'identification des axes de formation, 
  • par l'acquisition de compétences, 
  • comme outil de formation, 
  • comme étape d'un bilan de compétences ou d'élaboration d'un projet professionnel.

plus indirectement par son impact managérial :

  • en accroissant l'implication de la hiérarchie dans le développement de ses collaborateurs, 
  • en créant plus de motivation et d'adhésion à l'entreprise, 
  • en permettant une prise de recul et une clarification des valeurs et des comportements souhaités.


Une approche centrée sur le comportement

  1. La mise en situation au regard d'un référentiel

    Le Development Center est un processus global dont le coeur de l'approche est la mise en situation. Elle donne lieu à une lecture comportementale, en relation avec un référentiel de comportements attendus, propre à l'entreprise. Ce dernier est soit construit spécifiquement pour une population définie -dont il constitue en quelque sorte la fiche d'identité- soit plus généraliste, mais toujours adapté à sa culture.

    Le comportemental fournit une base concrète et tangible pour les deux parties. Dans cette optique, trois grands types d'outils sont utilisés :

    - les simulations en situation duelle, en face à face ou au téléphone, pour analyser les compétences en communication et prospective, 
    - les simulations de travail en groupe avec objectifs communs, différents, ou conflictuels pour observer des situations de production, de négociation ou de collaboration, 
    - le 'in-basket' pour investiguer les dimensions prise de décision et délégation.

    Le choix s'effectue en fonction du référentiel, d'aspects pratiques, notamment temporels, et de la dynamique que l'on souhaite créer.

  2. Le feed-back

    L'objectif est de donner au collaborateur observé un feed-back lui permettant de mieux comprendre ce que l'entreprise attend de lui, et pour celle-ci, de favoriser et mettre en place les conditions de cet ajustement. Le caractère concret, interactif et clarifiant de la démarche conduit la personne à un auto-positionnement au sein de son entreprise, à une prise de conscience de ses points forts et des axes de perfectionnement qui vont constituer son plan de développement personnalisé.

  3. Un complément éventuel par d'autres outilsqui viennent s'appuyer naturellement sur le socle comportemental du processus.

    - en amont : le 360° qui précède et prépare la mise en situation,
    - en parallèle : les tests de personnalité qui apportent une vision de l'être au service du faire.

 

Une nécessité de prolongement par un plan de développement personnalisé

Il s'agit d'un plan de progrès, véritable engagement réciproque entre l'entreprise et son salarié, dont la teneur varie en fonction des problématiques individuelles et des cultures d'entreprise.

Voici quelques formes d'interventions possibles :

  • actions spécifiques dans la fonction occupée : prise en charge d'un projet, participation à des groupes de travail particuliers, présentations dans le cadre de réunions..., 
  • bilans de compétences et de motivations, 
  • formations de type développement personnel, expérienciel ou liées à un besoin détecté, 
  • coaching, 
  • conférences, 
  • création d'un centre de ressources...


Un processus impliquant, mobilisateur et pédagogique

Dans sa substance même, le processus est apprenant, co-créateur et co-responsabilisant dans la relation entreprise-salarié. Il est souhaitable qu'un comité de pilotage soit nommé, qu'il définisse la finalité du projet et qu'avec le groupe de travail, il le mette en oeuvre. L'élaboration du référentiel requiert une réflexion interne exigeante sur le management, ses valeurs et ses critères. Cette prise de recul est en général facilitée par un intervenant externe. Le plus fréquemment, la construction et l'observation des simulations mobilisent à part égale ressources externes et ressources internes, préalablement sélectionnées et formées. Les actions conduites en complément, comme la formation, le coaching, peuvent être sous-traitées aussi bien qu'assurées en interne.

La mise en oeuvre d'un Development Center exige des précautions :

  • respecter les étapes pour éviter de renforcer les résistances et de provoquer un effet négatif, 
  • communiquer sur les objectifs, le processus, les personnes,concernées, les potentiels identifiés 
  • être clair sur les finalités et le délai de retour sur investissement, lever l'ambiguïté entre évaluation et développement, bannir le flou de la communication.


Cela nécessite une détermination et un engagement durable dans un processus itératif.

Jehanne MAROT et Fabienne PEZEU

 

 

 

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